En 2012, un rapport des Services aux Autochtones Canada (anciennement le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada) estimait qu’il faudrait construire 130 197 logements dans les réserves entre 2010 et 2031 pour faire face à la croissance des ménages et des familles, que 11 855 logements supplémentaires étaient nécessaires pour remplacer le parc existant détérioré, et que des rénovations majeures seraient nécessaires pour 10 861 logements existants.
Même s’il est vrai que l’offre de logements est une préoccupation dans tous les territoires du Canada, la pénurie touche de manière disproportionnée le peuple autochtone qui vit dans les réserves. Lawrence Dedam, résident et porte-parole de la Première nation Elsipogtog au Nouveau-Brunswick, estime le besoin de sa communauté à environ 500 logements. « Notre communauté enregistre un pic de 4 000 résidents, mais il nous manque peut-être 500 logements. Nos familles hébergent d’autres familles, les familles des amis, dans un seul logement. »
À Elsipogtog, et ailleurs, la pénurie n’est pas la seule préoccupation liée au logement. De nombreux logements existants ont été mal construits et ne sont pas en mesure de résister aux conditions ambiantes rigoureuses que connaissent de nombreuses communautés. Ce problème de durabilité entraîne plusieurs résultats négatifs : 1) les taux d’humidité élevés dans les logements conçus avec une gestion de la moisissure inadéquate ont provoqué la croissance de moisissures noires dans de nombreux logements, ce qui entraîne de graves conséquences sur la santé, 2) les familles ne sont pas capables de transmettre leurs logements aux générations suivantes, parce qu’ils ne durent pas suffisamment longtemps, et 3) les banques sont réticentes à hypothéquer des logements qui ne sont pas censés conserver leur valeur pendant la durée de la période d’amortissement.
Le problème du nombre insuffisant de logements et parfois de leur inadaptation tourmente les Premières nations du Canada depuis des dizaines d’années. Il s’agit d’un problème complexe entouré de difficultés environnementales, logistiques et liées aux infrastructures et à la gouvernance. Il est évident que les idées innovantes et les nouvelles façons de penser doivent prévaloir.
En définitive, il faut construire de meilleurs logements. À l’avenir, les nouveaux logements doivent être conçus afin de répondre aux besoins particuliers des peuples des Premières nations et être construits pour résister au climat rude qui frappe les endroits où vivent leurs communautés.
Dans une récente interview, un architecte réputé, Douglas Cardinal, a raconté une réunion qu’il a eue avec les Anciens des communautés du Nord, qui lui ont demandé de dessiner une meilleure maison pour leur peuple.
« Ils m’ont emmené dans une maison standard à mur sec construite sur pilotis et m’ont dit : “Ces maisons ne sont pas du tout bien pour nous… la moisissure entraîne de réels problèmes pour la santé pour nos enfants. Nous ne pouvons pas continuer à construire des maisons insalubres dans lesquelles nous élevons nos enfants. Ce n’est pas juste. Nous vous demandons de concevoir une maison saine qui dure longtemps afin que nous puissions la transmettre à nos petits-enfants”. »
Déterminé à trouver une vraie solution, Douglas Cardinal, accompagné d’une équipe compétente de professionnels de la construction, a dessiné, préfabriqué et assemblé la première maison Cardinal, un prototype en bois massif achevé en octobre pour la Première nation Elsipogtog du Nouveau-Brunswick.
La maison de deux étages et trois chambres de 1 100 pi2 est un bâtiment en bois solide et préfabriqué. Fabriquée hors chantier selon des normes strictes dans un environnement intérieur contrôlé, puis expédiée sur le chantier et assemblée en quelques jours seulement, la maison Cardinal est une solution en bois massif abordable, qui répond avec succès aux nombreux problèmes clés qui contribuent à la crise du logement. La maison Cardinal est un logement solide, écoénergétique, résistant à la moisissure, de qualité et durable, qui peut être assemblé rapidement au cours d’un cycle de construction court.
Idoya Arana-Beobide, administratrice déléguée de Douglas Cardinal Architect, a expliqué que la vision de Douglas Cardinal consistait à créer un logement sain, beau et durable pour les peuples autochtones. « Guidé par les Anciens, il a voulu faire une maison intégralement en bois, parce que le bois est le seul matériau de construction renouvelable dont nous disposons. Le bois est une matière vivante. On se sent bien quand on est entouré de bois, on se sent enveloppé. »
Les avantages de la construction en bois massif vont au-delà des facteurs esthétiques et environnementaux. Le bois massif offre une solution de construction polyvalente à haut rendement énergétique, qui peut répondre aux exigences les plus élevées. La maison innovante, abordable et écoénergétique est construite en bois lamellé-croisé, des panneaux lamellés-croisés isolés à haut rendement énergétique formant l’enveloppe du bâtiment. Préfabriqués hors chantier selon des réglages d’usine contrôlés et expédiés sur un camion unique, les panneaux structuraux et le toit du prototype de la maison Cardinal ont été assemblés en une fraction du temps nécessaire à la construction traditionnelle d’une maison à ossature légère.
Les besoins en logement dans le pays sont aussi divers que les communautés des Premières nations touchées par la crise, alors il n’existe pas de solution unique. Il faut également s’attaquer à de nombreuses difficultés liées aux infrastructures et à la gouvernance afin que toutes les communautés des Premières nations profitent de logements sains et bien construits. Pour l’instant, le prototype de la maison Cardinal, créé par Douglas Cardinal Architect en partenariat avec la Première nation Elsipogtog, Maisons Chicoine Homes et Element5, offre une solution prometteuse qui répond aux préoccupations centrales liées au logement en soi, sous la forme d’une maison sûre, abordable, saine, durable et soignée qui durera pendant plusieurs générations.